Photo prise par Robert Bichet dans l'"Allée" de Bracieux en été vers 1970
C'est juste après son mariage avec Martine Maillard qu'installé à Paris, Robert Bichet décide de se présenter à la librairie-édition Saint-Germain-des-Prés, près de Saint-Sulpice, dirigée par Michel et Jean Breton (initiateurs de la revue Poésie 1), pour leur proposer ses dernières compositions poétiques : "Mes Saisons de Bracieux" et "Poèmes venus d'Ailleurs", ainsi que les "Poèmes pour eux", un cri de révolte. Il y entraîne sa jeune épouse, l'invitant à publier simultanément sa propre poésie.
Sa rencontre avec Jean Orizet, le directeur littéraire, est très fructueuse : le poète vient de créer une nouvelle collection intitulée "Miroir Oblique" et accepte d'y engager les deux manuscrits, avec une part éditeur et le reste en bulletins de souscription, ce qui est plutôt généreux envers de jeunes débutants.
A la demande de Robert, Martine Maillard rédige aux Saisons de Bracieux une préface dans laquelle elle tente d'analyser et de développer toutes les facettes de la créativité de son époux, évoquant les écrits précédents, la Sologne, l'enfance, etc.... De son côté, Robert Bichet obtient de l'éditeur la publication d'illustrations de sa main, les premiers dessins que je vous ai détaillés ici, et en offre deux à sa compagne pour agrémenter sa propre plaquette - négligeant cependant à chaque fois d'apposer sa signature sous ses dessins.
Dessins réalisés par Robert Bichet pour Le Rossignol d'Argent
Mes Saisons de Bracieux
Mes Saisons de Bracieux se présente sous la forme d'un vaste poème en plusieurs parties, étiré au fil des pages dans une disposition étudiée et un graphisme travaillé.
Sans revenir aux "signes conventionnels" précédemment utilisés, Robert Bichet confirme sa volonté d'écrire non pas "des poèmes", mais des oeuvres poétiques complexes et structurées, qui sont en quelque sorte un avant-goût de la musique qu'il ne s'autorise pas encore à composer.
Installé en pleine tourmente parisienne alors qu'il a quitté le cocon protecteur du Mont Valérien, il se prend à regretter les nuits étoilées de son enfance et ses errances par les chemins de Sologne, où parmi les brandes au détour d'une clairière il voyait surgir le toit endormi d'un rendez-vous de chasse inhabité.
Comme dans les précédents articles, je remplacerai les sauts de page par une ligne en pointillé.
(Extrait des Saisons de Bracieux)
Les chemins
s'effaçaient
(au pas des ailes)
Et nous voguions ensemble
Aux grandes vitrines !...
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Nos rires
s'éparpillaient
(en grappes blanches...)
Ecorchant aux soleils
Les grands desseins... !
. . . I L L U M I N A I E N T . . .
Et nos chiens dessinaient
(en gerbes d'aurores !...)
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Un soir près des fossés ; je m'étais endormi comme dans un grand voyage... C'est peut-être après minuit ; (sur les platanes !...) L'oiseau s'était levé... (à la colombe...) et dessinait en arabesque près de mon arbre ; ... La lune n'éclairait pas encore mais j'avais posé l'astre tout au bout du sentier... !
Evidemment nous voyons dans le texte même les images apparues sur les dessins : ceux cités ci-dessus, et ceux détaillés dans l'article correspondant.
La vaste fresque s'achève en apothéose-surprise.
Il y avait un étang suspendu dans le ciel...
Ce serait comme hier...
Ce serait comme avant...
Tu créais des étoiles au fond des fleurs
Et des arbres
Et des fleurs au fond d'étoile
Tu as jeté la muse suspendue à son fil
Pour transformer les horizons... !
Robert Bichet © Editions Saint-Germain-des-Prés